Le communiqué en PDF pour impression
ABROGATION DE LA LOI RILHAC ET DE SES DÉCRETS D’APPLICATION !
Le décret n°2023-777 du 14 août 2023, relatif aux directeurs d’école, a été publié le 15 août. Il abroge et se substitue au décret de 1989 sur la direction d’école. En application de la loi Rilhac du 21 décembre 2021, il entend mettre en œuvre « une délégation de compétences de l’autorité académique pour le bon fonctionnement de l’école » et « une autorité fonctionnelle » pour les directeurs d’école, sans que ni l’une ni l’autre ne soient clairement définies, laissant la place à toutes les interprétations et pressions possibles ! L’augmentation de la charge de travail est, quant à elle, une réalité bien loin des engagements du gouvernement d’alléger et simplifier les tâches des directeurs d’école !
Ce décret engage une modification profonde du rôle du directeur, en le soumettant, par ailleurs, à une évaluation spécifique, tous les cinq ans, pour faire peser une pression permanente sur ses épaules et tenter de le contraindre à mettre en œuvre les contre-réformes ministérielles.
Pour autant, si le décret constitue un pas supplémentaire vers un statut particulier des directeurs d’école et, par conséquent, vers la création d’écoles autonomes, le processus n’est pas achevé ! En effet, les directeurs et directrices d’école appartiennent toujours au corps des Professeurs des Écoles, auquel sont rattachés des droits et garanties statutaires et, fort heureusement, les écoles n’ont pas de statut d’établissements !
Toujours plus de tâches supplémentaires !
Le décret n°2023-777, comme le décret de 1989, établit le directeur d’école comme responsable du fonctionnement de l’école dans le cadre de la réglementation. A ce titre, il réunit et préside le conseil d’école et le conseil des maîtres, admet les élèves inscrits et les répartit dans les classes après avis du conseil des maîtres, organise l’accueil et la surveillance des élèves, veille à la qualité des relations avec les familles et les partenaires, assure le suivi de l’assiduité des élèves, répartit les moyens d’enseignement, fixe les modalités d’utilisation des locaux scolaires pendant les heures et périodes au cours desquelles ils sont utilisés pour les besoins de l’enseignement et de la formation, organise le travail des agents communaux et contribue à la protection de l’enfance en lien avec les services compétents.
Le décret laisse la possibilité aux directeurs d’école d’organiser les élections de parents d’élèves « selon les modalités qu’il fixe après consultation du conseil d’école ». La loi Rilhac du 21 décembre 2021 permet l’organisation de ces élections par voie électronique. Dans les faits, les élections de parents d’élèves se dérouleront selon les mêmes modalités que les années précédentes, puisque le ministère refuse de financer les applications nécessaires au vote électronique et renvoie cette responsabilité aux communes. Et, en application du décret, le ministère demande aux directeurs de convoquer et réunir un conseil d’école extraordinaire, dans la plus grande précipitation, avant les prochaines élections de parents, pour le consulter sur les modalités d’organisation de ces élections. Saisi dans la journée de vendredi 15 par de nombreuses directions d’écoles, le SNUDI-FO 94 est intervenu auprès de la DSDEN 94 à ce sujet, lors du GT du 15 septembre sur la circulaire LADIRE pour la rentrée scolaire 2024-2025, et a demandé l’abandon de cette obligation de convoquer et réunir ce conseil d’école extraordinaire ; mesure inutile, absurde et chronophage. L’IEN Adjointe a répondu qu’il s’agissait d’une mesure imposée par la parution du décret du 14 août et une demande ministérielle. Voilà donc la réalité de l’allègement des tâches !
Dans le cadre de l’École inclusive, le décret précise que le directeur « contribue (dorénavant) à l’organisation du service des accompagnants des élèves en situation de handicap affectés dans l’école ». Ainsi, après les PIAL, qui organisent la mutualisation-diminution de l’accompagnement des élèves à besoins particuliers en les affectant sur plusieurs écoles, les directeurs d’école devraient maintenant gérer la pénurie et répartir les AESH en sous-nombre auprès des élèves notifiés de leurs écoles, se mettant ainsi en première ligne pour supporter les tensions et les pressions qui ne manqueront pas de survenir ! Pour le SNUDI-FO, 94, c’est non !!
Enfin, le décret n°2023-777 érige le directeur responsable, dans le cadre du plan particulier de mise en sûreté (PPMS), de prendre « toutes dispositions, en liaison avec les autorités administratives compétentes, pour assurer la sécurité des personnes et des biens, l’hygiène et la salubrité de l’école sur le temps scolaire. », disposition présente dans le Code de l’Éducation et qui s’appliquait jusqu’alors uniquement aux chefs d’établissement. Rappelons que l’article L411-4 du Code de l’Éducation, modifié en application de la loi Rilhac, précise que le PPMS est établi conjointement par l’autorité académique (dont le directeur détient désormais une délégation de compétences !) et la commune. En tout état de cause, il continue à en assurer la diffusion et la mise en œuvre ! Le SNUDI-FO 94 revendique que le PPMS soit intégré au plan communal de sauvegarde (PCS) et que le rôle du directeur soit limité à indiquer les changements dans les locaux et les personnes !
« Une autorité sur l’ensemble des personnes présentes » qui ouvre la voie à toutes les pressions !
L’article R. 411-10 du décret 2023-777 stipule que le directeur « prend toute disposition utile concernant l’organisation et le bon fonctionnement de l’école … À ce titre, il a autorité sur l’ensemble des personnes présentes dans l’école pendant le temps scolaire. »
Lors d’une réunion de directeurs, dans une circonscription du département, une IEN donnait sa définition de cette « autorité fonctionnelle » : selon elle, les directeurs pourraient prendre toute décision contre l’avis de leurs collègues et décider, par exemple, de la programmation des APC. Rappelons que la circulaire du 25 août 2020, parue au BOEN n°32 du 27 août 2020, précise : « Les directeurs d’école ont, avec les équipes pédagogiques, la pleine responsabilité de la programmation et de la mise en œuvre des 108 heures dans le respect de la répartition réglementaire. » N’en déplaise à cette IEN, l’organisation des APC nécessite donc la prise en compte des contraintes personnelles et des choix des collègues et le directeur n’a pas capacité à imposer quoi que ce soit dans ce domaine.
Toujours selon cette IEN, les directeurs pourraient dorénavant imposer des projets et actions pédagogiques, voire même demander aux enseignants de rendre compte de leurs enseignements et des résultats de leurs élèves. Si le décret du 14 août 2023 stipule que le directeur « pilote le projet pédagogique » et est responsable « d’engager des actions (…) permettant à l’équipe pédagogique d’améliorer l’efficacité de l’enseignement. », il n’est nullement précisé qu’il appartient au directeur d’école de construire, seul, le projet pédagogique ou les actions menées dans l’école ! Quant à s’immiscer dans les méthodes pédagogiques des collègues de l’école, même un chef d’établissement n’a aucun droit de regard sur la pédagogie des enseignants ! Le SNUDI-FO 94 rappelle que les enseignants du premier degré, conformément à leur statut, disposent de leur liberté pédagogique, définie par l’article L912-1 du Code de l’Éducation, article qui n’est pas abrogé par le décret du 14 août 2023.
Pour finir, cette même IEN expliquait que le directeur ne pourrait justifier auprès de sa hiérarchie le refus de son équipe de participer à tel projet ou de répondre à telle demande institutionnelle puisqu’il a l’autorité nécessaire pour l’imposer à ses collègues. N’en déplaise une nouvelle fois à cette IEN : le directeur d’école n’exerce pas d’autorité hiérarchique sur son équipe et n’a pas capacité à rendre obligatoire ce qui ne figure pas dans les Obligations Réglementaires de Service, comme par exemple la participation à une évaluation d’école !!
Pour le SNUDI-FO 94, le gouvernement entend transformer les directeurs en managers chargés de mettre en œuvre les contre-réformes, remettant en cause le statut et le fonctionnement de l’Ecole publique. Et la publication des décrets d’application de la loi Rilhac, malgré l’opposition de la très grande majorité des collègues, va indéniablement dans ce sens. Il s’agit d’augmenter la pression pesant sur nos collègues, au moment où le président Macron et le ministre Attal entendent accentuer la territorialisation de l’Education nationale et transformer l’Ecole de la République en une myriade d’écoles autonomes, avec le « pacte », le dispositif « Notre École, Faisons-La Ensemble », les évaluations d’école, l’expérimentation marseillaise ,… De plus, chacun comprend que la loi Rilhac et ses décrets d’application visent aussi à créer des tensions et des divisions entre les collègues d’une école.
Mais « il y a loin de la coupe aux lèvres » et les collègues peuvent toujours s’appuyer sur leurs garanties statutaires et le syndicat pour les faire respecter.
En cas de pressions, saisissez immédiatement le SNUDI-FO !
Le SNUDI-FO 94 rappelle que les professeurs des écoles ont un statut de fonctionnaire d’Etat, avec des obligations règlementaires de service définies par décret (n° 2017-444 du 29 mars 2017) ; ils ne peuvent être contraints de s’engager dans le cadre territorialisé des expérimentations diverses qui se multiplient partout pour disloquer l’École de la République ainsi que dans les évaluations d’écoles et d’établissements qui ne reposent sur aucune base réglementaire.
Le SNUDI-FO 94 rappelle que les enseignants du premier degré, conformément à leur statut, disposent de leur liberté pédagogique, définie par l’article L912-1 du Code de l’Education, article qui n’est pas abrogé par le décret du 13 août 2023.
Le SNUDI-FO 94 rappelle enfin que les IEN restent l’autorité hiérarchique des enseignants du premier degré, en charge, notamment, de l’évaluation des personnels et de la gestion des ressources humaines de la circonscription !
Le SNUDI-FO réaffirme ses revendications : De la loi Rilhac au pacte Macron, en passant par les évaluations d’école ou l’expérimentation marseillaise, le président et son ministre poursuivent bien un seul et même objectif : remettre en cause méthodiquement l’Ecole publique et nos statuts en calquant le fonctionnement des écoles sur celui des entreprises privées, en instaurant la concurrence entre écoles, entre collègues, sous l’égide de directeurs que le ministre voudrait transformer en contremaîtres chargés d’appliquer ses contre-réformes. Face à cette offensive généralisée, le SNUDI-FO revendique : • L’abrogation de la loi Rilhac et de ses décrets d’application ! • Le maintien du décret de 1989 sur la direction d’école ! • La satisfaction des revendications concernant la direction d’école : augmentation des décharges, aide administrative statutaire dans chaque école, 100 points d’indice pour tous les directeurs, l’allègement des tâches de directeurs ! • L’abandon de toutes les mesures visant à détruire l’Ecole publique : « pacte », expérimentation marseillaise, « Notre Ecole, Faisons-La Ensemble », évaluations d’école… • Une augmentation immédiate de 10% de la valeur du point d’indice et le rattrapage du pouvoir d’achat perdu depuis 2000 par l’augmentation de 27,5% de la valeur du point d’indice ! |
Créteil le 16 septembre 2023