Remise en cause du code de l’Education dans les écoles d’Orly : Courrier à madame la DASEN

Le courrier à la DASEN en PDF pour impression

Le courrier de la mairie d’Orly aux directeurs

Le formulaire municipal de demande de salle

Vous lirez ci-dessous le courrier adressé par Sylvain Bui, délégué syndical du SNUDI-FO 94 et récemment élu nouveau secrétaire de la Formation spécialisée départementale (nouvelle appellation du CHSCT 94) lors de l’installation de cette instance le 6 mars dernier, adressé à madame la Directrice Académique, présidente de la formation spécialisée 94. Pour rappel, la FNEC FP-FO 94 est devenue, lors des dernières élections professionnelles de décembre, la première Fédération syndicale dans le Val-de-Marne, obtenant 4 sièges sur 10 (3 FSU, 2 UNSA, 1 CGT).

Le courrier concerne la situation inacceptable des écoles d’Orly concernant l’utilisation des locaux scolaires. Nous invitons tous les collègues à en prendre connaissance avec attention et à nous saisir si des problématiques du même type existaient dans leur commune. Nous ne manquerons pas d’intervenir à ce sujet dans les instances et d’en saisir immédiatement la DASEN.

mails à adresser à 94snudifo@gmail.com

Courrier à madame la DASEN :
Remise en cause du code de l’Education
dans les écoles d’Orly

Objet : respect des prérogatives de l’Etat dans le fonctionnement des écoles à Orly

Créteil le 22 mars 2023

Madame l’Inspectrice d’Académie, présidente de la Formation spécialisée,

Notre organisation syndicale vous a saisie le 6 mars, lors de la réunion d’installation de la Formation spécialisée, du courrier sur l’utilisation des locaux scolaires adressé par la ville d’Orly aux directions d’écoles de la ville (par mail et par voie postale). Ce courrier a des conséquences graves sur les conditions de travail des enseignants des écoles d’Orly et remet en cause le Code de l’Éducation et notamment le droit syndical pour les professeurs des écoles exerçant leur activité dans les écoles de cette commune.

Vous nous aviez indiqué ne pas connaître ce courrier. Nous vous l’avions transmis durant l’instance. Je me permets de vous solliciter à nouveau à ce sujet en qualité de secrétaire de la Formation spécialisée….

Dans ce courrier, les responsables de la ville d’Orly s’adressent en effet aux directions d’écoles en indiquant « la ville est amenée à mettre à disposition des locaux aux équipes pédagogiques pour l’organisation d’activités extrascolaires. » Dans ce qu’ils présentent comme activités extrascolaires qui seraient organisées par les équipes pédagogiques, ces responsables listent notamment la remise des livrets scolaires, la tenue des conseils d’école, les réunions d’information aux familles, les réunions pédagogiques, les fêtes d’école, les réunions syndicales, les réunions des associations de parents d’élèves.

Or, ces activités ne sont absolument pas des activités extrascolaires (qui relèvent des prérogatives de la mairie) mais des activités nécessaires aux besoins de la formation initiale et continue qui se déroulent sous la responsabilité du directeur d’école.

Le temps de formation initiale et continue est défini très clairement dans le code de l’Education et dans la circulaire du 22 mars 1985 en son article 1.2. Ces textes qui s’imposent à tous, y compris à la Maire d’Orly, sont rappelés dans le règlement type départemental adopté par le CDEN (article 4.1) :

« Doivent être considérées comme nécessaires aux besoins de la formation initiale et continue les activités suivantes :

– les activités d’enseignement proprement dites : les heures de classe, y compris les enseignements de langue et culture d’origine (intégrés ou différés) organisés sous l’autorité de l’administration scolaire, ainsi que les actions de formation continue ;

– les activités qui constituent un prolongement de l’enseignement : les activités pédagogiques complémentaires, l’accompagnement éducatif, les stages de remise à niveau ;

– les activités directement liées aux activités d’enseignement, ou qui en constituent un prolongement : les réunions des équipes pédagogiques, du conseil des maîtres, du conseil des maîtres de cycle ou du conseil d’école ; les réunions syndicales organisées dans le cadre du décret n° 82-447 du 28 mai 1982 relatif à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique ; les réunions tenues par les associations locales des parents d’élèves qui participent à la vie de l’établissement. »

Ces responsables de la ville d’Orly rappellent (sic!) dans ce courrier aux directions d’école de la ville que « chaque utilisation doit faire l’objet d’une demande adressée aux services des affaires scolaires et de l’entretien des locaux qui évalueront les besoins de l’activité. » Ces demandes d’autorisation devraient être effectuées par le directeur via un formulaire mairie. Dans ce formulaire, une partie est réservée à la direction de l’éducation de la ville qui accorde ou refuse la demande du directeur.

Ce courrier exige encore de nos collègues directeurs que toutes les demandes (soient) transmises au plus tard 15 jours avant la date souhaitée : « Dans un souci d’organisation toutes les demandes doivent être transmises au plus tard 15 jours avant la date souhaitée. »

Ainsi donc, d’après ce courrier, les directeurs des écoles d’Orly et les enseignants de la ville qui sont pourtant fonctionnaires de l’Etat et non sous une autorité municipale, ne pourraient effectuer leur activité professionnelle (remettre les livrets aux parents, se réunir en conseil des maîtres, conseil de cycle, organiser une fête d’école, participer à une réunion syndicale…) qu’après avoir sollicité préalablement par écrit et 15 jours à l’avance l’autorisation du service des affaires scolaires et de celui de l’entretien des locaux qui, après avoir évalué « les besoins de l’activité » décideront ou non de les autoriser !!!

Enfin, concernant les réunions syndicales des enseignants, la mairie d’Orly prétend interdire leur tenue dans les écoles, en précisant : « pas de mise à disposition de salle« , alors que le code de l’Education et le décret n° 82-447 du 28 mai 1982 relatif à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique garantissent, au contraire, la tenue de ces réunions syndicales dans les locaux scolaires. Il faudrait là encore que « le demandeur s’adresse directement au cabinet de Madame la maire » qui « évaluerait les besoins de l’activité » et déciderait d’octroyer éventuellement une salle municipale en dehors des écoles !

Ainsi, contrairement aux lois et au code de l’Education, la mairie d’Orly prend le contrôle des locaux scolaires et renverse totalement la hiérarchie des normes.

Rappelons que, si la Mairie est propriétaire des locaux, la loi précise que « L’ensemble des locaux scolaires est confié au directeur, responsable de la sécurité des personnes et des biens, sauf lorsqu’il est fait application des dispositions de l’article L.212-15 du code de l’Education qui permet au maire d’utiliser, sous sa responsabilité, après avis du conseil d’école, et consultation du conseil des maîtres les locaux scolaires pendant les heures ou périodes au cours desquelles ils ne sont pas utilisés pour les besoins de la formation initiale et continue ». (Règlement type départemental des écoles).

Le Maire peut donc utiliser les locaux scolaires sous certaines conditions, mais il doit, pour cela, consulter préalablement le conseil d’école (article L 212-15), voire avoir un accord préalable du conseil d’école et du directeur (article L 216-1). Le code de l’Education précise encore que « Ces activités doivent être compatibles avec la nature des installations et l’aménagement des locaux » (article L 212-15).

Le fait d’être propriétaire des locaux ne permet donc absolument pas au Maire d’en faire usage à sa guise, puisque les locaux scolaires sont confiés au directeur d’école, qui est fonctionnaire de l’Etat (et donc pas sous une autorité municipale). Contrairement à ce qui est stipulé dans ce courrier, et contrairement à ce qui se passe dans les écoles d’Orly, c’est donc au Maire de faire une demande écrite au directeur d’école lorsqu’il souhaite pouvoir utiliser les locaux scolaires.

Madame la Directrice Académique, cette logique visant à se substituer aux enseignants et directeurs d’école dans le fonctionnement des écoles, au mépris des textes réglementaires, aboutit non seulement à remettre en cause les compétences et prérogatives de l’Education nationale et de ses personnels, mais aussi à placer les enseignants sous une tutelle municipale.

De plus, si l’article L 216-1 du code de l’Education indique que « les communes, départements ou régions peuvent organiser dans les établissements scolaires, pendant leurs heures d’ouverture et avec l’accord des conseils et autorités responsables de leur fonctionnement, des activités éducatives, sportives et culturelles complémentaires. », il précise que «  Ces activités sont facultatives et ne peuvent se substituer ni porter atteinte aux activités d’enseignement et de formation fixées par l’Etat. »

La mairie d’Orly tente donc à travers ce courrier d’imposer une réglementation locale qui remet en cause la loi et le Ministère de l’Education nationale. La loi établit que c’est le périscolaire (qui est facultatif) qui ne doit pas porter atteinte à l’école (qui est obligatoire) et donc qui doit adapter son fonctionnement afin qu’il ne s’effectue pas au détriment du fonctionnement de l’Education nationale.

Depuis le 19ème siècle, et notamment depuis la loi Guizot du 29 juin 1833 et les lois Ferry, les communes ont la charge des écoles qu’elles ont l’obligation de créer et d’entretenir. Selon l’expression, cette compétence se limite au « matériel ». L’enseignement relève de la compétence de l’Etat qui, d’ailleurs, rémunère les professeurs des écoles et instituteurs qui sont fonctionnaires de l’Etat et, à ce titre, placés sous l’autorité de la Directrice Académique des Services de l’Education Nationale.

Cette répartition des compétences et des prérogatives entre la commune et l’Etat est établie par la loi, en l’espèce par le code de l’Education, qui réaffirme la responsabilité prépondérante de l’Etat dans l’organisation du service public national de l’éducation dans son article L 211-1 et précise à l’article L.212-4 du même code la compétence d’attribution des communes (qui sont propriétaires des locaux et ont le devoir d’en assurer la construction et l’entretien). Une mairie ne peut décider de s’affranchir de la loi et de s’octroyer des prérogatives qui relèvent de l’Etat.

Madame la maire d’Orly n’a donc aucune capacité à remettre en cause par un courrier le Code de l’Éducation. Les directeurs n’ont pas à formuler une demande d’autorisation nécessitant l’accord ou le refus de la ville pour organiser les activités nécessaires aux besoins de la formation initiale et continue. C’est bien le directeur d’école qui est responsable des locaux dans ce cadre, ainsi que pour la tenue de réunions syndicales dans les écoles, qu’elles soient statutaires ou d’information, réunions syndicales dans les écoles qui sont autorisées et garanties par la loi.

Madame la Directrice Académique, vous en conviendrez, un règlement intérieur local, un protocole municipal de fonctionnement ne peuvent en aucun cas remettre en cause la loi et le code de l’Education. Sans respect de cette hiérarchie des normes juridiques, il n’y a plus d’Education nationale, il n’y a plus de République !

C’est la raison pour laquelle je me permets de vous demander d’intervenir auprès de madame le maire d’Orly, afin de faire retirer le courrier et le « formulaire de demande de salle » adressés aux directions d’école et de faire respecter la réglementation protégeant les personnels de l’Education Nationale de toute ingérence extérieure.

Respecter la place et les prérogatives de l’Education nationale, protéger les personnels qui sont placés sous votre autorité, c’est rétablir l’école républicaine et la République elle-même.

Certains de l’attention que vous porterez à ce courrier, je vous prie de recevoir, madame la Directrice Académique, présidente de la Formation spécialisée, l’assurance de toute ma considération.

Sylvain BUI, représentant FNEC FP-FO 94 et secrétaire de la Formation spécialisée

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