Le 1er août, quelques jours avant que le ministre n’ouvre l’agenda social sur la direction d’école, la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale présente un rapport sur la direction d’école.
Que contient vraiment ce rapport ?
Prenant prétexte de la situation dégradée des directeurs créée par le refus d’augmenter les décharges, d’améliorer le régime indemnitaire, de renouveler les aides administratives et de respecter le décret de 1989, le rapport établit une liste de propositions qui bouleverseraient totalement le fonctionnement des écoles publiques, remettraient en cause nos garanties statutaires.
Suppression des écoles maternelles, de bon nombre d’écoles rurales… et retour des EPEP
Le rapport préconise de supprimer toutes les écoles maternelles en les fusionnant avec les écoles élémentaires au sein d’écoles primaires ! De la même manière, les petites écoles rurales devraient être regroupées pour permettre « l’émulation » entre les élèves et un meilleur « travail d’équipe » entre les personnels. Des milliers d’écoles seraient ainsi rayées de la carte (ainsi que les postes de directeurs) et des milliers de classes seraient fermées en globalisant les effectifs.
Le rapport préconise la mise en réseau des écoles « par bassin de vie » autour du collège du secteur pour mieux les « inscrire dans leur territoire». Ces réseaux, outre la mutualisation des locaux envisagée, préparent « des enseignements communs école/collège » avec « interventions croisées PE enseignants du secondaire ». C’est le retour aux EPEP, un projet gouvernemental rejeté à l’époque par le SNUDI-FO, le SNUipp, SUD, la CGT qui n’avait pu aboutir grâce à la mobilisation des enseignants des écoles initiée par le SNUDI-FO.
Des directeurs supérieurs hiérarchiques des enseignants
Pour manager ces nouveaux établissements constitués de regroupements d’écoles, le rapport propose de créer un statut de directeur, accessible par concours. Les « néo-directeurs » les écoles de 10 classes et plus bénéficieraient d’une décharge totale (financée par la suppression des classes générée par les regroupements). Les directeurs des écoles de 10 classes et plus ne seraient plus des enseignants. Ce statut mettrait fin à la référence au décret de 1989 qui fait du directeur un professeur des écoles qui occupe une fonction particulière. Le lien avec la mission d’enseignement serait supprimé.
Ce « néo-directeur » serait supérieur hiérarchique des enseignants, sur la base d’une « lettre de mission » chargé entre autres de leur accorder ou de leur refuser des autorisations d’absence et serait responsable de la mise en oeuvre effective dans l’école des différents projets.
La quotité de décharge des directions d’école de 5 classes à 9 classes serait portée à 50 %.
Seuls 20 % des directeurs actuels pourraient prétendre au titre de directeur
Combien des actuels directeurs pourraient conserver un poste de direction ? La réponse est donnée par Mme Rilhac, une des deux députées ayant rédigé le rapport, « sur les 45 000 directeurs actuels, seuls 20 % d’entre eux pourraient prétendre au titre de directeur ». Pour 80 % des collègues, ce sont donc des pertes financières et de temps de décharge !
De nouvelles missions pour les directeurs d’écoles
Quant aux « néo-directeurs », ils se verraient attribuer de nouvelles missions : ils devraient gérer, voire assurer, « le remplacement des enseignants absents », devenir « le coordinateur de réseau d’éducation prioritaire », avoir des missions dans « la lutte contre la pauvreté et l’exclusion» pour « repérer les situations difficiles et orienter les familles » et même « devenir directeur du périscolaire » ! Ce nouveau statut placerait les directions d’école dans une grande dépendance de la collectivité territoriale par la tutelle du PEdT…
Le SNUDI-FO demande au ministre la satisfaction des revendications des directeurs (décharges, indemnités, aide administrative) et la non-prise en compte des propositions du rapport parlementaire
Dès le 29 juin, lors d’une audience au ministère sur la direction d’école, une délégation du SNUDI-FO, porteuse de milliers de signatures sur la pétition nationale direction d’école avait présenté les revendications en termes de décharges, de rémunérations, de conditions de travail…
Elle avait souligné notamment que dans de nombreux départements, les 4 jours annuels pour les chargés d’école et les 10 jours pour les directions d’écoles de 2 et 3 classes ne sont même pas respectés. De même, la situation de nombreuses écoles qui accueillent des ULIS, UPEAA n’est pas prise en compte alors que la quasi-totalité du temps de décharge de ces écoles est « consommée » pour le fonctionnement de ces dispositifs.
Enfin dans plusieurs départements, des DASEN refusent de comptabiliser comme des classes pour le calcul des décharges et du régime indemnitaire, les dédoublements des CP en REP et CE1 en REP+ ; les collègues directeurs de ces écoles se retrouvent dans les faits avec plus de classes, plus d’enseignants et parfois moins de décharge, voire un régime indemnitaire diminué.
La délégation avait aussi rappelé que les réunions de directeurs avec les IEN ne pouvaient se dérouler en dehors du temps de travail des collègues. Elle avait fait part de son inquiétude à ce sujet et avait saisi le ministère de situations particulières de départements dans lesquels, alors que ces réunions se déroulaient jusqu’à maintenant sur le temps des animations pédagogiques, les DASEN annoncent que dorénavant elles se tiendraient sur la base du bénévolat !!!
Le SNUDI-FO revendique :
■ La non-prise en compte par le ministère des propositions contenues dans le rapport de la commission
des affaires culturelles de l’Assemblée nationale ;
■ L’augmentation des décharges de service, le maintien intégral et l’extension des cadres départementaux plus favorables ; pas un directeur sans décharge statutaire hebdomadaire ;
■ La prise en compte dans tous les départements de toutes les classes dans le calcul des décharges de direction, y compris les CP et CE1 dédoublés en Éducation prioritaire ;
■ Une réelle amélioration financière : 100 points d’indice pour tous ;
■ Une aide administrative pour chaque directeur avec des emplois statutaires de la Fonction publique ;
■ La tenue de toutes les réunions durant le temps scolaire avec le remplacement du directeur par un titulaire-remplaçant ;
■ Le transfert de la responsabilité de la rédaction des PPMS aux mairies, dans le cadre du plan communal de sauvegarde ;
■ Le rétablissement du cadre national de l’école publique et l’arrêt des processus de territorialisation, afin de préserver les directeurs comme leurs adjoints des ingérences et pressions locales ;
■ L’attribution de l’ensemble des postes de direction au barème (AGS) ; non aux postes profilés !
■ Le respect du décret de 1989 fixant les missions des directeurs.
Alors que dans le cadre de l’agenda social, le ministre va organiser des réunions sur la direction d’école, le SNUDI-FO vient de s’adresser au ministre pour lui demander de ne pas retenir les propositions du rapport de la commission des affaires culturelles et de l’Éducation de l’Assemblée nationale, propositions qui ne peuvent pas faire l’objet d’expérimentations comme cela semble être le cas dans l’Ain, et nous sollicitons l’ouverture de négociations sur les revendications concernant la direction d’école.
Montreuil, le 11 septembre 2018