Le communiqué en PDF pour impression
Convention citoyenne sur les « temps de l’enfant » : une attaque frontale contre le statut des enseignants, notamment le statut particulier des professeurs des écoles !
Le président Macron, prétendument motivé par l’intérêt des élèves, a annoncé, le 2 mai, le lancement, au mois de juin, d’une convention citoyenne sur les « temps de l’enfant ».
Cette convention citoyenne aurait à débattre, en particulier, de la question des rythmes et de la durée des vacances, la durée et l’organisation des journées scolaires, les horaires des écoles et établissements du second degré, … sous le prétexte fallacieux que les périodes de vacances seraient trop longues et trop nombreuses, …
Constituée d’un panel de Français tirés au sort chargés d’auditionner des experts et, ensuite, d’émettre des avis dont le gouvernement pourrait se saisir, cette convention citoyenne serait conduite par le Conseil économique, social et environnemental (CESE), dont les membres sont issus d’organisations de la vie civile. Le CESE définirait ainsi le cadre, les modalités d’organisation et la gouvernance de cette convention citoyenne.
Pour le SNUDI-FO 94, le président Macron, qui contourne à dessein les enseignants et leurs organisations syndicales en mettant en place cette convention citoyenne sur « les temps de l’enfant », vise à faire éclater le statut des enseignants, en particulier le statut de professeur des écoles !
Face à la résistance des personnels qui refusent la dislocation du cadre national de l’École publique et défendent leur statut d’enseignant fonctionnaire d’État et les droits qui y sont liés, la convention citoyenne du président Macron apparaît comme une manœuvre politique visant à isoler les enseignants pour mieux attaquer leurs intérêts matériels et moraux !
Une convention citoyenne pour exploser
le cadre national et territorialiser l’École publique !
Il s’agirait, selon le président Macron, « de dégager de nombreux consensus entre tous ceux qui sont touchés par ce vaste sujet, comme les parents, la communauté éducative y compris périscolaire, les collectivités locales et même les professionnels du tourisme ». Ainsi, les parents d’élèves, les municipalités, les lobbies du tourisme et « la communauté éducative » sont invités à oublier leurs intérêts particuliers et même contradictoires pour repenser le calendrier et la journée scolaire, pour aboutir de fait à des organisations scolaires en fonction des territoires !!
Ne nous y trompons pas, l’annonce de la convention citoyenne n’est rien d’autre
qu’une nouvelle tentative de poursuivre à marche forcée la territorialisation de l’École !
La loi de la Refondation[1] de 2013, dite « loi PEILLON », a considérablement accéléré le processus de territorialisation de l’École. Le Projet éducatif de territoire (PedT), qui en est la pierre angulaire, permet d’associer « aux services et établissements relevant du ministre chargé de l’Éducation nationale, d’autres administrations, des collectivités territoriales, des associations.» (Art. 66). La réforme des rythmes scolaires a, pour sa part, institué les municipalités comme « maîtres d’œuvre » de l’organisation de la semaine scolaire et constitue, encore aujourd’hui, un cadre de la territorialisation de l’École, dans l’objectif de remettre en cause « la même École pour tous » fondée sur des programmes d’enseignement et des diplômes nationaux.
Rappelons que les décrets HAMON et BLANQUER, s’ils l’ont assoupli, ont maintenu et confirmé le cadre général de la loi PEILLON et du décret PEILLON sur les rythmes scolaires, en permettant à chaque commune d’établir des horaires hebdomadaires locaux particuliers en modifiant le calendrier national et en revenant en particulier sur les 36 semaines d’enseignement. La résistance des personnels avec le SNUDI-FO a permis qu’aujourd’hui 96% des communes françaises soient revenues à la semaine de 4 jours, en particulier dans notre département où toutes les écoles fonctionnent sur ce même rythme avec 6 heures de classe les lundi, mardi, jeudi et vendredi.
Avec la loi « pour l’école de la confiance », le Ministre BLANQUER s’inscrit dans la loi de la Refondation : « Il s’agit d’innover pour s’adapter aux besoins des territoires (…) ». Elle permet de favoriser les « projets pédagogiques locaux adaptés au plus près des besoins des élèves par le recours aux expérimentations (…) l’évaluation des établissements ». Elle autorise le Ministre à recourir aux ordonnances, en particulier pour la mise en œuvre de la réforme territoriale. L’École Blanquer de la confiance, c’est à la fois la fin de l’égalité républicaine, la remise en cause du statut des personnels de l’Éducation nationale et un pas supplémentaire vers la privatisation de l’école.
Dans le cadre du Conseil National de la Refondation lancé par le Président Macron, le Ministre NDIAYE a mis en place les « projets innovants » qui, contre quelques deniers publics, permettaient de lier des écoles à des contrats d’objectifs associant « les personnels, les élèves, leurs parents, les collectivités territoriales, les services déconcentrés et l’ensemble des partenaires qui le souhaitent ». Les « projets innovants » du Ministre NDIAYE ont ouvert la voie aux expérimentations, à la déréglementation et à la remise en cause du cadre national de l’École publique et de notre statut national avec la multiplication de projets territoriaux dans la droite ligne de l’expérimentation marseillaise !
Les évaluations d’école s’inscrivent dans le prolongement des différentes contre-réformes mises en œuvre par les ministres qui se sont succédés (de la loi PEILLON instaurant les PEDT à la loi BLANQUER), mais qui, à l’instar de la réforme des rythmes scolaires se sont heurtées à la mobilisation des enseignants et sont restées inachevées. Ces évaluations d’école ont pour objectif de territorialiser l’École publique en la soumettant à toutes les pressions locales, permettant notamment que les enseignants soient évalués par les parents, les élèves, les collectivités territoriales… Là encore, les objectifs de territorialisation se sont heurtés à la résistance des collègues [2], amenant la Rectrice de Créteil à reconnaître en CSA que « les évaluations d’école ne peuvent pas être imposées ».
Pour le SNUDI-FO 94, les objectifs du président Macron sont clairs :
- engager une nouvelle offensive pour faire exploser le cadre national de l’École publique, « la même École pour tous » qui délivre des diplômes nationaux reconnus dans les conventions collectives et les statuts nationaux,
- amplifier l’entreprise de territorialisation de l’École publique,
- dynamiter le statut particulier de professeur des écoles, socle de l’École publique républicaine, garant de l’égalité de traitement des personnels et de l’égalité d’accès à l’instruction publique pour tous les élèves !
Le SNUDI-FO 94 refuse la territorialisation de l’École publique : il s’est opposé et a combattu la réforme des rythmes scolaires, la mise en place des projets éducatifs de territoire, les Cités éducatives, la loi Rilhac, les évaluations d’école, … L’Éducation doit rester nationale, le statut des enseignants fonctionnaires d’État doit être respecté !
Une convention citoyenne pour exploser les Obligations Réglementaires de Services et le temps de travail des enseignants !
Aujourd’hui, tous les enseignants du 1er degré sont soumis à la même répartition du temps de service, quelle que soit leur commune d’exercice sur le territoire. Chaque enseignant est soumis au même statut de fonctionnaire d’État.
La convention citoyenne sur « les temps de l’enfant » porte en germe une violente charge contre le temps de travail des enseignants.
Le président Macron a toujours lié l’augmentation du salaire des enseignants à l’augmentation de leur temps de travail et à la réalisation de « nouvelles missions » ; le PACTE en est l’illustration la plus évidente !
Le président Macron a toujours appelé à « repenser la fonction » d’enseignant et le « temps de l’enseignement » qui « n’est pas satisfaisant par rapport au nombre d’enseignants embauchés », allant jusqu’à qualifier le système de « trop rigide ».
Rappelons également que la Cour des comptes, depuis 2015, défend l’annualisation du temps de travail des enseignants, qui ne serait plus établi sur une base hebdomadaire comme aujourd’hui, mais aligné sur la durée annuelle de travail fixée à 1 607 heures – soit 35 heures hebdomadaires – dans les administrations et établissements de l’État, laquelle ne s’applique pas aux enseignants dont les obligations de service sont définies nationalement par le décret n°2017-44 du 29 mars 2017.
Pour le SNUDI-FO 94, il s’agit, pour le président Macron et à travers la convention citoyenne, de soumettre les enseignants à ces 1 607 heures annualisées, en définissant de nouvelles « missions annexes » qui ne se limiteraient pas aux heures de classes devant élèves, tout cela sous la tutelle directe des PEDT !
Pendant que se prépare un budget 2026 avec un minimum de 40 milliards d’euros de coupes supplémentaires et déjà des crédits de budgets 2025 gelés (95 millions enlevés à l’enseignement scolaire et rendus à Bercy par un décret du 26 avril dernier), l’opération « convention citoyenne sur les temps de l’enfant » vise d’une part à détourner l’attention des véritables problèmes de l’École et d’autre part à avancer dans le territorialisation de l’École publique et la destruction du statut de fonctionnaire d’État !
Classes surchargées, fermetures de classes, absence de remplaçants, manque de structures et d’enseignants spécialisés, inclusions en classe banale par défaut d’élèves à qui l’accès aux établissements médico-sociaux est refusé faute de place, manque d’AESH, … Cette situation de délabrement des conditions de travail des enseignants et d’apprentissage des élèves s’aggrave avec le budget d’austérité 2025 !
Pour le SNUDI-FO 94, pour améliorer les conditions d’apprentissage des élèves, pour garantir leur droit à l’instruction, l’urgence est de répondre aux revendications exprimées par les personnels, à savoir l’annulation des 5 000 fermetures de classe, la création de tous les postes nécessaires dans les écoles, la création des places nécessaires dans les établissements sociaux et médico-sociaux, un statut de fonctionnaire d’État et un vrai salaire pour les AESH, l’abandon de l’Acte 2 de l’École inclusive, …
Le SNUDI-FO 94 rappelle ses revendications :
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Maintien du statut particulier des enseignants du 1er degré, avec des ORS définies uniquement en heures hebdomadaires d’enseignement, les mêmes pour tous, sur tout le territoire national !
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Abrogation du décret PEILLON de janvier 2013 ainsi que des décrets HAMON (2014) et BLANQUER (2017) qui le complètent !
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Instauration d’une norme de 4 jours sur 36 semaines sur tout le territoire, pour toutes les écoles sans exception !
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Maintien de la définition nationale des dates de congés et vacances scolaires sans possibilité de dérogation !
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Arrêt des PEdT et des ingérences municipales dans le fonctionnement de l’école ; Respect des articles L212-15 et L216-1 sur l’utilisation des locaux scolaires qui ne relève pas du bon vouloir de maires ! Non à la confusion scolaire/périscolaire !
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Abandon des évaluations d’école !
[1] Lors du CSE du 14 décembre 2012, FO vote contre le projet de loi de Refondation. UNSA, CFDT, SNALC votent pour et la FSU s’abstient.
[2] Motion unanime pour l’abandon des évaluations d’école adoptée par les 580 participants à la RIS SNUDI-FO, SNUipp, CGT Educ’action et Sud Education d’octobre 2023.